De l’Occident à l’Orient : Voyage au but d’un dialogue au devenir nébuleux

Le rapport entre l’Orient et l’Occident est un rapport de pouvoir, de domination, de complexité hégémonique : l’Orient n’est pas seulement adjacent à l’Europe ; il est aussi la place de la plus grande, la plus riche et la plus ancienne colonie, la source de ses civilisations et de ses langues, son alter ego culturel, et l’un de ses rivaux les plus intimes.

Edward Said, homme de Lettres Palestinien

Dans l’illimité de la ratio occidentale, subsiste cette fracture désignée comme l’Orient : l’Orient, envisagé tel un point originel, rêvé en tant que source abyssale d’où jaillissent des nostalgies anciennes et des promesses de retour inexprimables, l’Orient soumis à l’ardeur colonisatrice de l’Occident, mais perpétuellement inatteignable, car il demeure cette frontière infranchissable : l’aube des commencements, un horizon où l’Occident a vu le jour, mais où il a également érigé une ligne de démarcation insurmontable. L’Orient représente pour l’Occident l’altérité absolue, malgré le fait que l’Occident y puise sa vérité primordiale. Il est impératif de composer une histoire de cette division majeure, en suivant son évolution au cœur de la civilisation occidentale, en la traçant dans sa continuité et ses interactions, tout en laissant transparaître son hiératisme tragique. Néanmoins, cette quête, aussi noble soit-elle, doit impérativement requérir une reconnaissance intransigeante des violences passées et présentes, particulièrement celles perpétrées par l’entité sioniste contre les Palestiniens. Sans cela, tout dialogue s’avère futile et dénué de sens.

L’Orient, en tant que point d’origine et de frontière ultime, est constamment perçu par l’Occident comme une source mythique et primordiale. Cette perception n’est pas simplement géographique, mais profondément enracinée dans les symbolismes culturels et philosophiques. L’Orient, dans l’imaginaire occidental, se présente simultanément comme le berceau de civilisations anciennes et énigmatiques et comme un territoire de sagesse archaïque et de traditions mystiques. Cette vision est empreinte d’une fascination pour la profondeur historique et la richesse culturelle qui sont jugées antérieures et supérieures à celles de l’Occident.

Cependant, l’Orient demeure aussi la limite de l’Occident. Il incarne ce qui est autre, ce qui est fondamentalement distinct et souvent incompréhensible. Cette altérité suscite autant de curiosité que de crainte, car elle remet en question l’universalité supposée de la raison occidentale. L’Orient est une énigme qui échappe aux tentatives de catégorisation et de rationalisation occidentales. Il reste un domaine de mystère, une frontière au-delà de laquelle la raison occidentale rencontre ses propres limites.

Dans le cadre de l’idéologie coloniale, l’Orient a également été une cible privilégiée de la raison dominatrice de l’Occident. Le colonialisme européen, dans sa quête de domination et d’exploitation des terres orientales, a cherché à s’approprier et à rationaliser l’Orient. Cette entreprise coloniale était justifiée par une idéologie de supériorité culturelle et intellectuelle, qui considérait l’Orient comme une terre de barbarie nécessitant l’intervention civilisatrice de l’Occident.

Cependant, en dépit de ces efforts de domination et de rationalisation, l’Orient demeurait insaisissable. Les colonisateurs européens, en tentant d’imposer leur propre vision du monde, ont rencontré une résistance culturelle et spirituelle défiant leur compréhension et leur contrôle. L’Orient, avec sa complexité et sa diversité, échappait à la simplification et à l’assimilation coloniale, soulignant ainsi la limite intrinsèque de la raison occidentale.

Pour qu’un dialogue authentique et productif s’engage entre l’Occident et l’Orient, il est impératif que l’Occident dénonce les crimes commis par l’entité sioniste contre les Palestiniens. La question palestinienne est profondément ancrée dans l’histoire coloniale et post-coloniale. La création de l’État d’Israël en 1948 et la Nakba, ou catastrophe, qui s’en est suivie pour les Palestiniens, représentent un point central de conflit et de tension dans les relations entre l’Occident et le monde arabe. Ce conflit ne se limite pas à une question de territorialité, mais englobe également des aspects de reconnaissance, de droits humains et de justice.

Pour que ce dialogue prenne forme de manière honnête et productive, l’Occident doit dénoncer les crimes perpétrés par l’entité sioniste contre les Palestiniens. Ces crimes incluent, entre autres, les démolitions de maisons, les expulsions forcées, la construction de colonies illégales, les blocus et les sièges, ainsi que les violences militaires disproportionnées contre les civils. La reconnaissance de ces injustices et la condamnation des politiques oppressives sont des étapes nécessaires pour établir une base de dialogue fondée sur la justice et l’équité.

Un dialogue véritablement inclusif doit accorder une place centrale aux voix palestiniennes. Trop souvent, les discussions internationales et médiatiques sur le conflit israélo-palestinien excluent ou marginalisent les perspectives palestiniennes. Pour remédier à cela, il est crucial de donner une plateforme aux Palestiniens afin qu’ils puissent exprimer leurs expériences, leurs souffrances et leurs aspirations. Cela implique de soutenir les initiatives palestiniennes de résistance légitimes et de collaborer dans la dénonciation des crimes de guerre des responsables sionistes dans les forums internationaux.

Les intellectuels et les universitaires occidentaux ont un rôle particulier à jouer dans ce processus. Ils doivent utiliser leur position et leur influence pour sensibiliser le public à la réalité de l’occupation et de l’oppression en Palestine. Cela passe par la recherche, la publication d’articles et de livres, l’organisation de conférences et de séminaires, ainsi que par le soutien aux mouvements de boycott, de désinvestissement et de sanctions (BDS) contre Israël, tant que les violations des droits des Palestiniens se poursuivent.

La dénonciation des crimes commis contre les Palestiniens et la reconnaissance des injustices historiques sont des étapes cruciales vers une réconciliation véritable. Cependant, il ne s’agit pas seulement de pointer du doigt et de condamner ; il s’agit aussi de chercher des solutions justes et durables. Cela implique de soutenir activement les efforts de paix basés sur le droit international, de promouvoir l’établissement d’un État palestinien viable et souverain.

En conclusion, l’Orient, en tant qu’origine et limite de la ratio occidentale, représente une dimension essentielle et complexe de l’histoire et de la culture occidentales. L’étude de cette grande césure, tout au long du développement occidental, révèle non seulement les interactions et les échanges qui ont marqué les relations entre l’Orient et l’Occident, mais aussi les tensions et les conflits qui ont sous-tendu ces relations.

En reconnaissant la profondeur et la richesse de cette histoire et en s’efforçant de dépasser les divisions et les stéréotypes, nous pouvons espérer construire un avenir où l’Orient et l’Occident sont véritablement compris et valorisés dans leur diversité et leur interdépendance.

Pour cela, la reconnaissance des crimes commis contre les Palestiniens et la promotion d’un dialogue véritable et équitable sont indispensables. Seule une telle approche permettra de dépasser les divisions historiques et de construire un avenir commun fondé sur le respect mutuel et la justice.

Khaled Boulaziz