L’ère contemporaine est marquée par l’avènement de nouveaux démiurges : non plus des dieux ancestraux, mais des milliardaires technophiles, les nouveaux « seigneurs de la Silicon Valley », qui, dans leur quête effrénée d’une transcendance numérique, imaginent réécrire les lois de la nature et de l’humanité. Ces derniers, ivres de leur propre pouvoir, aspirent à renverser l’ordre naturel, poussés par une croyance aveugle en leur capacité à défier la mort elle-même. Parmi eux, Peter Thiel, l’un des fondateurs de PayPal, incarne cette foi délirante dans l’immortalité, ce rêve impie qui prend racine dans les profondeurs les plus obscures de la Silicon Valley.
Thiel, et ses semblables, ne se contentent plus de regarder le monde tel qu’il est. Non, ils souhaitent contrôler la destinée humaine, manipuler le corps et l’esprit dans une quête insatiable de longévité infinie. À travers la cryogénisation, ils croient pouvoir échapper à la fin inéluctable qui attend tous les mortels. Dans ce contexte, l’argent devient le vecteur d’une promesse: celle d’un futur où la mort n’est plus qu’une illusion, un obstacle que l’élite des « bien-nés » peut contourner grâce aux technologies. Alors que des centaines d’hommes et de femmes attendent dans des réservoirs d’azote liquide leur réveil dans un monde encore à inventer, des milliers de « simples » continuent de lutter pour leur survie dans des conditions inhumaines, privées des ressources nécessaires pour atteindre la moindre chance d’avenir.
Qu’ils se congèlent eux-mêmes dans un élan d’hubris technologique n’est que le symptôme d’un mal plus profond. Ces élites, persuadées de pouvoir se réinventer éternellement grâce aux progrès scientifiques, détournent l’essence même de la vie humaine : la solidarité, la compassion, et l’effort collectif pour le bien commun. Ils investissent des milliards dans la quête de l’immortalité, tout en détournant le regard des milliards de souffrances humaines qui se déroulent dans l’ombre de leur tour d’ivoire numérique. Car il est plus aisé de rêver d’une vie éternelle quand on est confortablement installé dans le fauteuil doré des privilégiés que de se pencher sur les maux réels de ceux qui, chaque jour, se battent pour survivre dans des conditions que seule la barbarie peut engendrer.
L’impudence de ces milliardaires est effrayante. Non seulement ils échappent aux conséquences de leur propre avidité, mais ils cherchent à en étendre les frontières, allant jusqu’à nier la réalité même de la fin. Leur message est clair : la mort est une fatalité pour les autres, pas pour eux. Tels des dieux déchus de leur propre mythologie, ils se croient au-dessus des lois naturelles, créateurs d’un nouveau monde qui leur serait exclusivement destiné. Ils comptent sur leur pouvoir économique et technologique pour forger un avenir où la souffrance et la finitude n’auront plus leur place — mais à quel prix?
Le discours actuel des puissants et des milliardaires, obsédés par l’immortalité et la domination, ne fait qu’exacerber les inégalités et éteindre les lumières de l’espoir. Ces hommes et ces femmes, plongés dans leur obsession de repousser les frontières de la mortalité, ne se préoccupent guère du fait que ce même argent pourrait être mieux investi dans des projets d’avenir, à savoir l’exploration de l’univers.
Exploration de l’Univers : Une promesse de paix et de progrès
Pourquoi ces mêmes puissants ne s’élancent-ils pas vers l’inconnu, vers l’immensité de l’univers, au lieu de consacrer des milliards à des conflits interminables et destructeurs ? L’immensité de l’univers, avec ses milliards de galaxies et ses mystères infiniment plus vastes que les petites guerres humaines, offre une alternative plus que séduisante, un terrain fertile à la coopération, à l’unité, et à l’innovation. Là où les armes sèment le chaos et la division, la science, l’exploration spatiale et les grands projets communs nourrissent des rêves d’unité, de progrès et de prospérité.
Au lieu de continuer à s’embourber dans les conflits, ces ressources devraient être allouées à des projets pacifiques d’exploration spatiale, qui ne manqueraient pas seulement de conquérir des cieux inconnus, mais aussi de poser les fondations d’une nouvelle ère de collaboration et de progrès scientifique. Imaginez un monde où, au lieu de détruire des vies, des technologies sont déployées pour protéger, soigner et construire. L’exploration de l’espace pourrait servir d’union pour l’humanité, laissant derrière elle les querelles intestines et la guerre pour une mission commune qui transcende les frontières et les idéologies.
L’univers n’est-il pas un terrain d’expansion bien plus vaste et prometteur que le champ de bataille que ces élites semblent vouloir étendre à l’infini ? La conquête spatiale offre une promesse d’avenir, une occasion rare de réinventer nos sociétés, de repartir de zéro, de créer un monde basé non pas sur la compétition pour des ressources limitées, mais sur l’accès à des ressources infinies.
Les avancées dans la technologie spatiale ne sont pas seulement une fuite en avant dans l’imaginaire ; elles sont une source de solutions concrètes pour les crises terrestres : des nouvelles sources d’énergie, des technologies environnementales révolutionnaires, des découvertes en biotechnologie et en médecine qui pourraient résoudre nombre de nos défis les plus pressants.
Vers un futur commun, ou la perpétuation du chaos ?
Les nouvelles figures de la Silicon Valley, en poursuivant leurs rêves de domination et d’immortalité, détournent des ressources qui pourraient être mieux utilisées pour des projets de grande envergure. L’argent qu’ils investissent pour se projeter dans un futur immortel et individuel pourrait être mis à profit pour unir les nations dans la conquête de l’univers, un projet commun qui effacerait les clivages et donnerait un sens véritable à notre existence collective. Plutôt que d’entretenir des armées, de financer des guerres inutiles ou des projets de surveillance de masse, ces milliards pourraient ouvrir la voie à un monde où la technologie est utilisée pour l’élévation de tous, et non pour la domination d’une élite.
La guerre ne fait que diviser, creuser des fossés, nourrir la haine et la souffrance. L’exploration de l’espace, elle, invite à la coopération, à l’unité, à la quête de sens au-delà des conflits terrestres. En scrutant l’immensité de l’univers, nous serions amenés à comprendre l’infinité de notre propre monde et la petitesse des querelles humaines qui nous déchirent aujourd’hui. Ces rêves d’immortalité, d’éternité, de domination, sont des chimères qui nous empêchent de voir la vérité en face : l’unité et l’espoir véritables se trouvent dans l’élan vers l’inconnu, non dans la prolongation infinie de nos petites existences.
Un choix crucial pour l’avenir de l’humanité
Les seigneurs de la tech, dans leur recherche d’immortalité, sont pris dans une illusion d’auto-glorification qui aveugle leur regard sur les vrais défis de l’humanité. Plutôt que de multiplier les ressources consacrées à des projets démesurés de domination et de guerre, il est plus que temps de réorienter nos priorités vers un objectif supérieur : celui de l’exploration, de la compréhension, et de l’unité humaine à travers la conquête spatiale. Ce n’est pas dans l’immortalité personnelle qu’il faut investir, mais dans l’immortalité de notre rêve collectif — celui de dépasser les frontières de notre monde et de bâtir, ensemble, un futur digne de l’humanité.
Khaled Boulaziz
