France-Algérie : Une rivalité de façade, une alliance souterraine

Les tensions récurrentes entre la France et l’Algérie ne sont qu’une mise en scène bien orchestrée, où chaque pouvoir joue un rôle prédéfini pour préserver des intérêts plus vastes. Derrière les discours enflammés et les crises médiatisées, les deux États restent liés par des mécanismes profonds qui dépassent largement les affrontements de surface. Loin d’être de véritables adversaires, ils sont en réalité les deux faces d’une même médaille, se nourrissant mutuellement d’un rapport d’antagonisme construit de toutes pièces.

Une instrumentalisation politique des tensions diplomatiques

Les échanges virulents entre Paris et Alger surviennent toujours à des moments stratégiques, où les deux gouvernements ont besoin de consolider leur position interne. En France, la montée des droites extrêmes oblige le pouvoir en place à afficher une posture intransigeante sur les questions migratoires et sécuritaires. L’Algérie devient alors un levier idéal pour affirmer une autorité qui, dans les faits, reste largement illusoire.

Du côté algérien, l’évocation constante du « péril français » sert à détourner l’attention des crises internes. Face à un mécontentement grandissant dû à la corruption, à la crise économique et au blocage des institutions, le régime algérien brandit l’hostilité historique envers la France pour consolider un nationalisme de façade. Cette manœuvre permet aux généraux au pouvoir d’éviter toute remise en question de leur autorité et de masquer l’absence de réformes démocratiques réelles.

Ces tensions, loin d’être des ruptures véritables, sont en réalité des outils politiques utilisés pour distraire l’opinion publique. Elles participent à un équilibre fragile qui maintient en place un système de domination partagée, où chacun joue son rôle dans un scénario déjà écrit d’avance.

L’Algérie, une junte militariste au service d’intérêts opaques

Loin d’être un État souverain pleinement consacré à l’émancipation de son peuple, l’Algérie demeure sous le contrôle d’une caste militariste qui détient tous les leviers du pouvoir. Depuis l’indépendance, l’armée et les services de renseignement ont consolidé un régime où la richesse nationale est accaparée par une minorité, au détriment du développement économique et démocratique du pays.

Cette élite, composée de hauts gradés et d’oligarques, agit avant tout pour ses propres intérêts et non pour ceux de la nation. Contrairement au discours officiel, qui met en avant une posture de défiance vis-à-vis de la France, ces dirigeants entretiennent des liens étroits avec les cercles d’influence parisiens. Ils détiennent des biens immobiliers en France, y placent leurs familles et leurs capitaux, tout en affichant un discours hostile pour préserver leur légitimité auprès de la population.

Cette double posture est révélatrice d’un jeu d’équilibre où le pouvoir militaire algérien feint de s’opposer à la France, tout en lui garantissant un accès privilégié aux ressources stratégiques du pays.

Le gaz algérien : un outil de soumission économique

L’un des aspects les plus significatifs de cette complicité souterraine réside dans les accords énergétiques entre les deux pays. Alors que l’Algérie dispose d’importantes réserves de gaz, elle les vend à la France à un prix largement inférieur à celui du marché international.

Cet avantage exorbitant accordé à Paris n’est pas le fruit d’une simple négociation commerciale, mais bien le signe d’une relation de dépendance soigneusement entretenue. Loin d’être une puissance indépendante dictant ses propres conditions, Alger agit en sous-main pour préserver les intérêts économiques de l’ancienne puissance coloniale.

Cette anomalie économique révèle l’existence d’un pacte tacite entre les élites des deux pays : en échange de ces concessions énergétiques, le régime algérien obtient la garantie d’un soutien discret de la part de l’État français. Ce soutien se manifeste notamment par la protection des avoirs de l’oligarchie militaire en France, l’accès à des circuits bancaires et immobiliers privilégiés, ainsi qu’une certaine complaisance dans les affaires judiciaires impliquant des dignitaires du régime.

La France et l’Algérie, des acteurs de second plan dans un jeu géopolitique plus vaste

Si ce modèle de relations permet de maintenir un certain statu quo entre Paris et Alger, il est de plus en plus fragilisé par les évolutions du contexte international.

L’Algérie, longtemps perçue comme un acteur incontournable dans le monde arabe et africain, voit son influence s’éroder face à l’émergence de nouvelles puissances. La Russie et la Chine, notamment, cherchent à s’imposer dans la région en proposant des alternatives aux partenariats traditionnels avec l’Occident. De leur côté, les États-Unis privilégient désormais des alliances plus stratégiques avec des pays du Golfe et du Sahel, reléguant Alger au second plan.

Dans ce contexte, la France elle-même n’est plus en mesure d’imposer son agenda. Les crises à répétition avec l’Algérie ne sont que les symptômes d’une perte d’influence plus générale, où les anciennes puissances coloniales peinent à maintenir leur emprise sur leurs anciens territoires.

Face à ces mutations, la junte algérienne n’a d’autre choix que de diversifier ses alliances et de s’adapter aux nouvelles dynamiques de pouvoir. Toutefois, elle reste prisonnière d’un système où la survie politique repose sur des arrangements opaques, perpétuant ainsi un modèle de gouvernance basé sur la rente et la prédation.

Une relation de dépendance masquée par des tensions de façade

Les tensions entre la France et l’Algérie ne sont donc qu’un leurre, une mise en scène savamment orchestrée pour masquer une réalité bien plus cynique : loin d’être adversaires, les élites des deux pays sont en réalité profondément liées par des intérêts communs.

Le régime militariste algérien, sous couvert d’un discours de rupture, reste l’un des meilleurs alliés de la France en Afrique du Nord. En échange de certaines concessions économiques et stratégiques, il obtient une forme de protection qui lui permet de se maintenir au pouvoir sans jamais être réellement inquiété.

La France, de son côté, tire parti de cette relation ambiguë pour sécuriser ses approvisionnements en gaz, maintenir son influence dans la région et préserver les intérêts de ses grandes entreprises. Cette complicité se traduit par une indulgence systématique à l’égard des dérives du régime algérien, qui bénéficie d’un traitement de faveur malgré son caractère autoritaire et corrompu.

Ainsi, les crises diplomatiques qui ponctuent régulièrement les relations entre Paris et Alger ne sont que des soubresauts d’un système bien huilé, où chacun trouve son compte dans un jeu de dupes qui dure depuis des décennies. Derrière les postures belliqueuses et les discours nationalistes, la réalité est tout autre : la France et l’Algérie ne sont pas ennemies, mais partenaires dans une alliance tacite où seul le peuple demeure le grand perdant.

Khaled Boulaziz