Les élections législatives seront propres et honnêtes.
Sid Ahmed Ghozali
Sid Ahmed Ghozali, ancien Premier ministre de l’Algérie et figure clé des événements qui ont ébranlé le pays dans les années 1990, est décédé ce 4 février à l’âge de 88 ans. Acteur incontournable de la scène politique, Ghozali a occupé plusieurs postes de haut niveau, notamment ministre de l’Énergie et chef du gouvernement, à des moments cruciaux de la transition algérienne. Ses analyses tranchantes et ses critiques sur la gouvernance du pays, en particulier sur la prétendue démocratisation de la fin des années 1980, restent essentielles pour comprendre l’histoire contemporaine de l’Algérie.
Dans l’une de ses déclarations les plus marquantes, Ghozali avait rejeté le pluralisme politique instauré à la fin des années 1980, le qualifiant de simple « ouverture politique de façade ».
« Les Français avaient surnommé Mouloud Hamrouche l’homme des réformes. Mais si nous voulons parler sérieusement des réformes en Algérie, il faut revenir à l’histoire. L’entourage de Chadli Bendjedid l’a poussé à effacer les réalisations de son prédécesseur », avait-il déclaré à Echorouk.
Il expliquait que Chadli Bendjedid n’était pas naturellement enclin à rompre avec les politiques de Houari Boumediene. « Pourtant, ceux qui l’entouraient l’ont convaincu qu’il devait couper avec le passé pour se donner l’image d’un président réformateur. »
Cependant, selon Ghozali, les réformes mises en place sous Bendjedid n’étaient en réalité qu’un coup d’État masqué, sans véritable alternative politique. La Constitution de 1989, qui consacrait le pluralisme politique, n’était pas le fruit d’une démocratisation sincère, mais une manœuvre calculée, orchestrée par Mouloud Hamrouche, qui avait supervisé l’ensemble du processus.
Ghozali soutenait que Bendjedid avait déjà moralement démissionné après les émeutes du 5 octobre 1988. La violente répression de ces manifestations, qui avait fait des centaines de morts et des milliers d’arrestations, marqua le début de l’intervention directe des militaires dans les affaires politiques du pays. C’est dans ce climat de crise qu’un nouveau pouvoir s’est progressivement imposé, dirigé par les « déserteurs de l’armée française ». Ces officiers, qui avaient quitté les rangs de l’armée coloniale pendant la guerre d’indépendance, avaient lentement pris le contrôle des appareils sécuritaire et politique du pays.
Les événements d’octobre 1988 leur ont offert une opportunité décisive : écarter l’administration civile de Bendjedid et s’imposer comme les véritables détenteurs du pouvoir. Mouloud Hamrouche, présenté comme l’architecte des réformes, ne faisait en réalité qu’exécuter un plan conçu par cette élite militaire. Sous prétexte d’ouverture politique, l’Algérie a été orientée vers un système soigneusement contrôlé où les décisions majeures restaient entre les mains de ces officiers, garantissant ainsi la perpétuation de leur domination.
L’analyse de Ghozali met en lumière un paradoxe fondamental du tournant post-1988 : bien que cette période ait été présentée comme une transition vers le pluralisme politique, elle a en réalité marqué la consolidation définitive de l’emprise militaire sur l’État, en particulier de la caste des officiers issus de l’armée française. Ce verrouillage du pouvoir allait précipiter l’Algérie dans une décennie de violences et d’instabilité.
Avec sa disparition, l’Algérie perd l’un des derniers témoins directs de cette époque charnière. Que l’on partage ou non ses analyses, Sid Ahmed Ghozali restera une voix singulière et intransigeante de l’histoire politique algérienne, révélant sans détour les mécanismes du pouvoir qui continuent encore aujourd’hui à façonner le pays.
Khaled Boulaziz