A l’heure où l’Occident célèbre le débarquement du 6 juin 1944, connu sous le nom de Jour J, il est crucial de ne pas oublier un autre débarquement tout aussi significatif, mais souvent relégué dans l’ombre de l’histoire : celui qui eut lieu en Afrique du Nord, et plus spécifiquement en Algérie, connu sous le nom d’Opération Torch.
La véritable histoire de l’Algérie ne saurait être contée que par ses propres fils. Dans les méandres du passé de cette terre, demeurent encore des chapitres à découvrir. Parmi eux, le débarquement anglo-américain lors de l’opération Torch, le 8 novembre 1942 à Alger, reste un épisode crucial, marquant un tournant il y a de cela un plus de quatre-vingts ans. À la fin de l’année 1942, dans le dessein d’alléger la pression sur le front russe, le président américain Roosevelt lança une opération d’envergure en Afrique du Nord.
À cette époque, l’Allemagne étendait son emprise sur le Maroc, l’Algérie et la Tunisie par le biais de ses alliés français à Vichy. Ces derniers, face à une défaite inéluctable en 1940, optèrent pour la collaboration avec les envahisseurs allemands plutôt que de résister. L’Allemagne déploya des forces d’élite pour défendre ses positions en Méditerranée, investissant d’énormes ressources dans la région.
Ainsi, le 8 novembre 1942, 124 000 soldats britanniques et américains débarquèrent à Casablanca, Oran et Alger dans le cadre de l’opération Torch. Objectif : ouvrir un nouveau front. Les Alliés ignoraient la réaction des troupes françaises de Vichy, soumises au commandement allemand.
Avant le débarquement, des diplomates et des officiers du renseignement américain, dont le célèbre Robert Murphy, avaient établi des contacts avec les leaders du Mouvement national algérien et les commandants de Vichy à Alger pour préparer l’invasion.
Les relations entre Alliés et Français étaient teintées d’une amitié historique et d’une animosité récente. Sans surprise, la réponse de Vichy à l’invasion américaine fut mitigée. Certaines unités se rendirent sans combattre, tandis que d’autres attaquèrent les forces alliées au moment du débarquement.
Il est évident que l’histoire officielle française rejette toute implication du Mouvement national et du peuple algérien dans le succès de cette opération. Par exemple, les entretiens entre Robert Murphy et Ferhat Abbas, avant et pendant le débarquement, ont été occultés par les historiens.
Après de violents affrontements, les combats cessèrent avec la promesse faite à l’amiral de Vichy, Jean Darlan, de maintenir son pouvoir, excluant ainsi toute participation des éléments de la résistance locale dans la gouvernance de l’Afrique du Nord.
L’opération Torch offrit à Roosevelt un nouveau front, soulageant les Russes. Les pertes s’élevèrent à environ 500 soldats alliés tués et 700 blessés.
Plutôt que de coopérer avec la résistance française hétéroclite, Roosevelt conclut un accord avec Vichy. En décembre 1942, Darlan fut assassiné, permettant aux États-Unis d’installer Henri Giraud, plus respectable, au pouvoir. En février 1943, Robert Murphy reçut un manifeste de 21 pages de Ferhat Abbas, intitulé « L’Algérie face au conflit mondial », un appel clair à la libération nationale.
Les événements s’accélérèrent avec les massacres du 8 mai 1945, point de non-retour dans la lutte contre le colonialisme.
Face à l’aveuglement de ceux qui prétendent être les gardiens de notre mémoire, il est essentiel de rappeler que les Algériens ne furent pas de simples figurants sur leur propre sol lors de ce débarquement qui marqua un tournant majeur dans la Seconde Guerre mondiale. La contribution du mouvement national et du peuple algérien à cette opération fut cruciale.
Cette histoire, occultée par l’histoire officielle française, reste à écrire. Elle le sera par les Algériens eux-mêmes, les vrais acteurs de leur destin sur leur propre terre.
Khaled Boulaziz