Une fumée blanche s’est élevée ce matin depuis le Vatican.
Le monde a acclamé l’élection de Léon XIV, nouveau pape de l’Église catholique.
Les écrans, les réseaux, les chancelleries ont salué la douceur d’un homme, la promesse d’un souffle nouveau.
Le pape a parlé. Longuement. De paix, d’unité, de fraternité universelle.
Mais il n’a pas dit Gaza.
Il n’a pas dit Palestine.
Il n’a pas pleuré les morts.
Et ce silence, ce silence au milieu du vacarme des bombes,
est une parole.
Une parole d’oubli. Une parole de complicité.
Ce jour-là, à Gaza, des enfants étaient ensevelis vivants.
Des écoles s’écroulaient.
Des hôpitaux brûlaient.
Des mères creusaient la terre avec les mains pour sauver un souffle.
Mais de Rome, rien.
Pas une prière.
Pas un verset.
Pas un cri.
On a parlé de la paix en général,
mais on n’a pas nommé la guerre en cours.
La paix sans vérité est une liturgie morte.
Un discours abstrait.
Une consolation pour les puissants, pas un refuge pour les opprimés.
Ce jour-là, le Christ n’était pas dans la cathédrale.
Il était dans la poussière de Gaza.
Il était dans les bras d’un père portant le corps disloqué de son enfant.
Il était dans la bouche sèche d’un poète criant vers le ciel.
Léon XIV a béni un monde qui regarde mourir un peuple.
Il a parlé au monde entier —
mais pas aux morts.
Ce n’est pas un oubli.
C’est un silence organisé.
Un silence géopolitique.
Un silence qui sauve les formes, et sacrifie les âmes.
Et moi, j’écris ceci non comme croyant, ni comme expert,
mais comme témoin d’une honte.
Je dis que ce silence-là nous engage tous.
Je dis qu’une parole qui refuse de nommer le crime devient complice.
Je dis qu’il n’y a pas de sainteté possible
quand on oublie les enfants sous les décombres.
Aujourd’hui, Léon XIV a été élu.
Et Gaza est restée seule dans les flammes.
Alors que reste-t-il à ceux qui ont encore un cœur battant ?
Le cri.
Le refus.
La fidélité aux morts.
Nous n’honorerons jamais une paix qui oublie les martyrs.
Et nous ne suivrons jamais comme guide celui qui consacre sans larmes.
Khaled Boulaziz