Même ici, l’anarchie est révolutionnaire.
Che Guevara lors de sa première visite à Alger.
La transition chaotique et l’émergence du système algérien
L’indépendance de l’Algérie a été marquée par une série de conflits internes, reflétant les tensions profondes au sein du mouvement nationaliste et au sein de la société algérienne elle-même. Ces conflits ont non seulement retardé la consolidation de l’État naissant mais ont aussi façonné la nature du régime politique algérien.
Conflits interne et exacerbation des identités
Les premières années de l’indépendance ont été caractérisées par des luttes intestines entre les maquisards de l’intérieur et les membres de l’armée des frontières. Ce conflit interne a été amplifié par la question identitaire entre l’arabisme et le berbérisme. La « guerre des sables », perçue par beaucoup comme une manœuvre pour détourner l’attention des véritables problèmes internes, a également exacerbé ces tensions. C’est dans ce climat chaotique que le « Système algérien » a émergé, consolidant son pouvoir.
L’armée des frontières contre le GPRA
En 1958, la création du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) à Tunis a marqué le début de conflits sévères entre trois factions principales :
- Conflit entre les détenteurs du pouvoir au sein du GPRA et les risonniers en France: Le noyau dur du GPRA, composé de Krim Belkacem, Abdelhafid Boussouf et Lakhdar Bentobbal, s’opposait aux cinq dirigeants nationalistes détenus en France depuis 1956, à savoir Ahmed Ben Bella, Hocine Aït Ahmed, Mohamed Boudiaf, Mostefa Lacheraf et Mohamed Khider.
- Tensions entre le GPRA et l’armée des frontières (ALN): L’ALN, cantonnée au Maroc et en Tunisie, revendiquait son autorité face au GPRA.
- Lutte entre l’armée des frontières et les maquis de l’intérieur: Les survivants des maquis de l’intérieur obéissaient au GPRA, tandis que l’armée des frontières reconnaissait l’État-major général (EMG) dirigé par le colonel Houari Boumediène.
La prise de pouvoir par l’armée des frontières
La consolidation du pouvoir par les partisans de l’armée des frontières, souvent appelés le « groupe d’Oujda », s’est déroulée en plusieurs étapes cruciales :
- Mai 1962: Ahmed Ben Bella et Houari Boumediène lancent un coup de force en sommant le GPRA de convoquer le Conseil national de la révolution algérienne (CNRA) en congrès pour contourner le GPRA par la création d’un bureau politique sous leur contrôle.
- 28 Mai 1962: Tensions au sein du GPRA éclatent, Ben Bella et ses partisans réussissent à faire adopter un modèle socialiste et un parti unique, marginalisant les ministres du GPRA comme Krim Belkacem.
- Tentatives de médiation: Les combattants des maquis et les wilayas tentent de médiation en formant un « comité interwilaya » qui condamne la rébellion de l’EMG.
- Réactions et mobilisation militaire: Le GPRA destitue l’EMG, mais Ben Bella et Boumediène mobilisent l’armée des frontières pour se préparer à entrer en Algérie.
- Confrontation finale: Les partisans de Ben Bella prennent des positions stratégiques, le GPRA est affaibli, et en septembre 1962, Ben Bella et Boumediène entrent à Alger à la tête de l’armée des frontières.
Le Coup d’État de septembre 1962
Les élections à l’Assemblée constituante, fixées au 20 septembre 1962, se déroulent sous contrôle strict. Ferhat Abbas est élu président de l’Assemblée nationale et proclame la République algérienne démocratique et populaire. Ben Bella est désigné pour former le premier gouvernement, et Boumediène devient ministre de la Défense. Le Front de libération nationale (FLN) devient le parti unique.
Réactions et opposition
Les anciens combattants de l’intérieur et divers responsables politiques s’opposent à ce coup de force. En septembre 1963, une tentative de rébellion est lancée par des cadres des wilayas, mais la « guerre des sables » avec le Maroc permet de réconcilier temporairement les factions internes.
En juillet 1964, face à la dérive autoritaire du régime, Hocine Aït Ahmed et Mohamed Boudiaf créent le Conseil national de défense de la révolution (CNDR). Cependant, la répression du régime est sévère, avec des exécutions et des emprisonnements de leaders rebelles.
Conclusion
Le mythe d’une révolution unie a éclaté face aux réalités claniques, donnant naissance à un système politique autoritaire où le pouvoir militaire a prévalu sur les aspirations démocratiques. Le « Système algérien » est ainsi né, structuré autour d’une centralisation du pouvoir et d’un parti unique, consolidant l’hégémonie de l’armée sur les affaires politiques.
Il est temps pour chaque Algérien de définir clairement sa position, avant qu’il ne soit trop tard. Le silence est pour le pouvoir la meilleure couverture, à l’abri de laquelle il cherche à imposer au pays un régime à sa convenance, fait de contrainte et d’arbitraire. Car, il ne faut pas s’y tromper, la dictature s’est installée depuis cet été fatidique, l’été. Les seules réalisations qui endurées le temps accomplies par ce systeme sont : :
— ABSENCE TOTALE DE LIBERTE D’EXPRESSION ET D’OPINION :
Les lois scélérates votées à tour de bras par un parlement non représentatif de la population algérienne ont totalement vidé la scène médiatique de toute critique du pouvoir en place.
— CONTRÔLE ABSOLU DE TOUTE LA PRESSE ET DES MOYENS DE PROPAGANDE : (radio nationale, télévision, Algérie-Presse-Service).
Ainsi impose-t- on au pays une information à sens unique, dans le plus pur style des pays totalitaires.
— RENFORCEMENT DE L’APPAREIL POLICIER :
Existence en son sein de hiérarchie parallèles, multiples et concurrentes méthodes de gangstérisme utilisées par les divers services, en dehors de tout contrôle et de toute garantie juridique.
— EXISTENCE ET RENFORCEMENT D’UN APPAREIL MILITAIRE :
Incompatible avec les possibilités économiques du pays.
— CONSTANT APPEL DÉMAGOGIQUE AUX FOULES :
dont on exploite les sentiments, au lieu de consulter le peuple algérien par les voies d’institutions réellement démocratiques.
— RECOURS, A L’OCCASION DE CHAQUE DIFFICULTÉ NOUVELLE, A DES DIVERSIONS :
C’est le règne des complots, excitations, intimidations. Un régime qui emploie de telles méthodes se sait condamné à court terme à l’alternative suivante : sombrer honteusement ou se maintenir par la force. Le pouvoir actuel a déjà fait son choix, le jour où il n’a pas craint de faire affronter des Djounoud, en déclenchant une guerre civile généralisée qui a fait plus de 250 000 victimes. Celle-ci fut déchaînée, malgré la vigilance et la sagesse de tout un peuple qui, dans sa volonté de survie et sa lassitude, a choisi de deux maux le moindre et préféré la paix dans une apparente stabilité aux malheurs de la lutte armée. Tout le mal a commencé à ce moment clé : celui du putsch du groupe d’Oujda contre le G.P.R.A.
Khaled Boulaziz