La nation algérienne renaîtra de ses cendres, quand l’autorité qui s’est exercée contre elle s’exercera pour elle. Une de cœur, faite en faveur de tous les algériens ; elle peut alors changer le destin de notre pays et le faire entrer dans le cycle des temps modernes.
Ferhat Abbas – Homme d’État Algérien (1899 – 1985)
L’État est vu comme l’aboutissement d’un développement historique et est reconnu à juste titre comme un processus obligé dans l’évolution de la liberté et de la conscience collective.
Conséquemment et à cet égard, l’État est une entité organique et éthique, une réalité qui dépasse les individus et les intérêts particuliers. L’État est par excellence le moyen par lequel la liberté et la volonté générale peuvent s’exprimer et se réaliser de manière organisée et bénéfique pour la société.
Cet État émerge lorsque les individus renoncent à leur liberté purement subjective et se reconnaissent mutuellement comme membres d’une communauté organique. C’est dans cette reconnaissance réciproque que la liberté individuelle trouve sa plus complète expression.
L’État-nation est un concept politique qui fait référence à un État souverain correspondant à une nation spécifique, c’est-à-dire à un groupe de personnes partageant un espace culturel, historique et souvent linguistique commun. L’État-nation est habituellement associé à la formation de l’État moderne et au processus de construction nationale.
Plus précisément, l’État se développe également à partir de formes antérieures d’organisation sociale, telles que la famille, les structures tribales et la société civile. La famille représente le niveau le plus élémentaire de l’organisation sociale, où les individus entretiennent des relations personnelles et affectives. Les tribus ont fréquemment une proto-structure politique décentralisée, où la prise de décision est répartie entre plusieurs chefs ou conseils tribaux. Les mesures importantes peuvent être prises lors de réunions ou de conseils où les membres du clan ont l’opportunité de participer et de s’exprimer. La société civile, en revanche, est caractérisée par des relations économiques et juridiques plus complexes et impersonnelles.
L’État est alors conçu comme la synthèse de ces trois sphères, créant l’ordre, la stabilité et la protection nécessaires à la réalisation de la liberté.
L’État idéal est celui qui reflète et réalise l’esprit d’un peuple spécifique. Chaque nation possède sa propre caractéristique culturelle, historique et spirituelle unique. L’État qui émerge de cette réalité spécifique doit nécessairement représenter les intérêts et les aspirations de la nation.
Dans le sillage de ce qui a été défini précédemment, la nation algérienne doit être considérée comme une communauté dans laquelle ses membres partagent un espace linguistique, culturel et une histoire commune, et l’État-nation est l’expression institutionnelle de cette nation.
Il est à noter que la guerre de libération a été un acte décisif dans la prise de conscience politique pour la formation de l’État-nation algérien, réalisant ainsi la destinée historique et la liberté du peuple. Cette structure est le moyen le plus approprié par laquelle les Algériens pourront s’auto-réaliser collectivement et s’émanciper en tant qu’État souverain.
Cependant, l’État-nation est un agencement vivant qui nécessite aussi le devoir et l’éducation civiques des citoyens conscients de leur rôle pour le soutenir et le protéger.
Il est compréhensible que les Algériens aspirent à la construction de leur État-nation. Cependant, malgré les immenses efforts consentis, il persiste des préoccupations et des attentes en Algérie concernant la construction de l’État-nation algérien.
L’Algérie a connu un parcours compliqué, avec des défis économiques, politiques et sociaux à la mesure de la complexité de son histoire. Les aspirations du peuple à un État-nation solide, stable et fonctionnel, incluant une gouvernance transparente, des institutions démocratiques, le respect des droits de l’homme, le développement économique, l’équité sociale et une justice indépendante, sont toujours d’actualité.
Bien que la construction d’un État-nation demande du temps et peut être un processus alambiqué, impliquant des assises institutionnelles, des débats politiques, des compromis et l’engagement de tous les acteurs concernés, y compris le gouvernement et la société civile, cela n’explique pas la dévastation socio-économique et politique dans laquelle se trouve la nation algérienne en raison de ce chantier qui tarde à se concrétiser.
Il est tout à fait clair que les aspirations du peuple algérien n’ont jamais été pleinement prises en compte par les dirigeants du pays, et que les efforts déployés pour y répondre ont été en deçà des attentes légitimes des citoyens. Leur participation, la transparence, la responsabilité et le dialogue n’ont non seulement pas été sincèrement promus, mais ont été systématiquement bannis par les leaders successifs du pays.
Si ce déni est fondamentalement le résultat des limites idéologiques inhérentes à la lutte pour la libération, il ne peut à lui seul expliquer non seulement le retard dans la construction de l’État-nation, mais aussi sa persistance. Le peuple est en droit d’examiner les raisons de cet atermoiement.
Au vu du statu quo prévalent, il est opportun de souligner que l’Algérie est sous influence, son armée qui a joué un rôle central dans la libération ne s’est jamais écartée de la vie politique du pays depuis l’indépendance en 1962.
De plus, cette forte présence suscite continuellement des critiques et des préoccupations quant à son impact sur la construction de l’État-nation. Certains estiment que cela a entravé le développement démocratique et la stabilité politique du pays. Il y a eu des périodes de répression politique intense, de limitation des libertés civiles et de restrictions à l’autonomie d’expression.
La construction d’un État-nation fort et inclusif nécessite des représentants légitimes du peuple, des institutions transparentes et responsables, ainsi qu’une participation significative des citoyens dans la sphère politique. La diversité culturelle, ethnique et linguistique de l’Algérie peut également vue comme un atout incontestable dans la construction d’une identité nationale.
Par conséquent, le peuple ne pourra s’émanciper et retrouver sa liberté d’action pour achever la construction de l’État-Nation que si la branche militaire du pouvoir exécutif obéit à une autorité civile légitime issue d’urnes libres. Faute de quoi, les Algériens continueront à pâtir sous le règne de ceux qui occupent le palais présidentiel et décident de la politique en fonction de leurs intérêts propres en premier.
Khaled Boulaziz