Dieu soit loué, il n’y a plus de colonisation dans notre pays
EL Anka
L’épée de l’injustice a été brisée au combat par les braves
Les hommes ont donné leurs vies dans nos forêts, déserts et montagnes
Longue vie à l’Algérie libre et à sa jeunesse
Longue vie à l’Algérie libre, à ses hommes et à ses femmes.
El Hadj M’hamed El Anka, de son vrai nom Mohamed Idir Aït Ouarab voit le jour le 20 mai 1907 dans les ruelles animées de la Casbah d’Alger. Issu d’une famille modeste originaire d’Azeffoun, il devient, au fil du temps, une figure emblématique de la musique algérienne, le précurseur et le maître incontesté de la chanson chaâbi.
Enfance : les premières notes d’un destin
Dans les ruelles étroites de Bab el Jdid, au cœur de la haute Casbah, naît le jeune Mohamed Idir. Son père, Mohamed Ben Hadj Saïd, est alité le jour de sa naissance, laissant un oncle maternel effectuer la déclaration à l’état civil. Un malentendu sur le patronyme émerge, transformant leur nom de famille en « Halo ». Cette anecdote, vraie ou non, reste gravée dans l’histoire familiale.
Sa mère, Fatma Bouchène Bent Boudjemaâ, est une femme attentionnée et aimante, veillant scrupuleusement à l’éducation de son fils. Entre 1912 et 1918, Mohamed fréquente plusieurs écoles, de l’école coranique de Bir Djebbah à l’école normale de Bouzareah. Mais les contraintes économiques l’obligent à quitter les bancs de l’école avant ses onze ans.
Apprentissage : les premiers pas dans la lumière
Sous l’œil bienveillant de Si Saïd Larbi, un musicien renommé, le jeune M’hamed découvre la musique lors des fêtes de ramadan de 1917. Repéré pour son sens du rythme, il est invité à jouer le tar dans l’orchestre de Mustapha Nador. Cette première reconnaissance lui ouvre les portes du monde musical, où il devient musicien à plein temps dans l’orchestre de Kéhioudji.
Après la mort de Cheïkh El Nadhor en 1925, M’hamed se perfectionne sous la tutelle de Cheïkh Reghai Abderrahmane jusqu’en 1932. À seulement 18 ans, il commence à animer des fêtes familiales, affirmant son talent et son originalité.
La naissance du chaâbi : une révolution musicale
En 1928, la carrière de M’hamed El Meddah (son nom de scène) prend un tournant décisif. Il enregistre 27 disques chez Columbia Records et participe à l’inauguration de la Radio PTT Alger. Ces événements propulsent sa popularité à travers le pays.
Son audace musicale introduit de nouveaux instruments comme le banjo, la derbouka, et le piano dans les orchestres medh. Il collabore avec l’artisan-luthier Jean Bellido pour créer le mandole algérien, révolutionnant ainsi le chaâbi. Ses improvisations et sa richesse mélodique séduisent un public de plus en plus large.
Le maître : l’héritage d’el anka
En 1955, El Hadj M’hamed El Anka devient professeur au Conservatoire municipal d’Alger. Ses élèves, tels qu’Amar Lachab et Ahcène Said, deviendront eux-mêmes des cheïkhs, perpétuant son héritage musical. Avec plus de 360 poésies interprétées et environ 130 disques produits, il laisse une empreinte indélébile dans la musique algérienne.
L’apport artistique durant la guerre d’indépendance
Pendant la guerre d’indépendance, El Anka utilise son art comme une arme culturelle pour galvaniser les cœurs et les esprits. Ses chansons deviennent des hymnes de résistance, imprégnées d’un profond sentiment patriotique. Il joue un rôle crucial en maintenant vivante l’identité culturelle algérienne, en mêlant des messages de liberté et d’espoir dans ses qasidates. El Anka organise des concerts clandestins, offrant un répit et une source d’inspiration aux Algériens sous l’oppression coloniale. Sa musique transcende les frontières, trouvant écho dans les communautés algériennes à travers le monde, renforçant ainsi le moral et l’unité du peuple en lutte.
La fin d’une carrière légendaire
El Anka donne ses derniers concerts en 1976 et 1977, jouant jusqu’à l’aube pour le mariage du petit-fils de son maître et pour des familles chères à son cœur. Il s’éteint le 23 novembre 1978, laissant derrière lui un héritage musical intemporel, reposant en paix au cimetière El Kettar à Alger. Son influence perdure, et sa musique continue d’enchanter et d’inspirer les générations futures, faisant de lui une légende éternelle de la culture algérienne.
Khaled Boulaziz